26 juin 2015

Le private equity tricolore joue la carte saoudienne

Le private equity tricolore joue la carte saoudienne

26/06/2015 Capital Finance

A l’heure où l’Afic a noué un protocole d’accord avec un fonds souverain de la monarchie pour développer les liens vers le non-coté français, CDC IC lance un fonds franco-saoudien de 400 M$.
La venue du prince Mohamed Bin Salman Bin Abdul Aziz Al Saoud à Paris n’aura pas seulement permis la signature d’un contrat avec l’Arabie Saoudite portant sur des hélicoptères Airbus. La visite du vice-prince héritier et ministre de la défense de la monarchie a aussi débouché sur un protocole d’accord visant à favoriser les investissements dans le non-coté tricolore. Sous le regard attentif du président de la République, François Hollande, le président de l’Afic, Michel Chabanel, a signé ce mémorandum avec le Public Investment Fund, l’un des fonds souverain locaux. En vertu de ce protocole, l’association servira en quelque sorte d’intermédiaire entre les investisseurs saoudiens et les sociétés de gestion françaises. De quoi laisser espérer les GPs hexagonaux de mettre la main sur de précieux contacts pour leurs levées.

CDC IC : un fonds franco-saoudien…
Ce n’est peut-être pas un hasard si la signature de ce mémorandum est intervenue concomitamment avec un autre évènement concernant directement « l’axe » France-Arabie Saoudite dans le domaine du private equity. Au terme d’un an de négociation, CDC International Capital vient en effet de conclure un accord avec Kingdom Holding Company pour le lancement du Franco-Saudi Investment Fund (FSIF). Disposant à ce stade de 100 M$ apportés à parité par la Caisse et ce holding coté présidé par le prince Al-Waheed, ce véhicule convoite 400 M$ d’engagements à terme. L’idée étant d’attirer des investisseurs originaires du Golfe (mais aussi d’autres horizons) pour compléter le tour de table. La CDC pourrait aller au-delà de son commitment initial, d’ici au closing.
… pour les ETI qui lorgnent le Golfe
La feuille de route du FSIF est claire : épauler les ETI françaises dans leur développement en Arabie Saoudite, mais aussi dans les autres Etats membres du Gulf Cooperation Council. Son approche sera opportuniste : minoritaire ou majoritaire, joint-venture ou sociétés de projet, du secteur des transports à l’agroalimentaire, en passant par la high tech, la finance, etc. La coopération entre CDC IC et Kingdom Holding Company ne s’arrête pas là. Dans le cadre de l’ouverture de la Bourse de Riyad aux investisseurs étrangers, ce dernier accueillera à son capital la filiale de la CDC, mais aussi d’autres grandes entreprises tricolores, à l’instar d’Axa, d’Engie, d’Orange ou de Suez Environnement. Cette « équipe de France » aura vocation à en détenir conjointement 1 % du capital, au travers d’un véhicule. Un moyen pour elle d’accroître à terme sa présence dans le Golfe.

Le prince Al-Walid veut aider les entreprises françaises à s’implanter en Arabie saoudite

LE MONDE ECONOMIE
La Caisse des dépôts (CDC) a annoncé, vendredi 26 juin, la création d’un « fonds
d’investissement franco-saoudien » avec le prince Al-Walid, le milliardaire le plus connu du royaume
wahhabite, actionnaire notamment de Citigroup, Time Warner, Euro Disney, Twitter ou encore Apple.
Objectif : aider les PME tricolores à s’implanter dans la péninsule arabique. La CDC et Kingdom
Holding Company (KHC), la société mère des activités de M. Al-Walid, apporteront dans un premier
temps 100 millions de dollars (90 millions d’euros) à ce fonds, répartis à parité. « Mais l’objectif est de
porter la dotation totale à 400 millions de dollars, qui seront levés auprès d’investisseurs présents dans
la région du Golfe », explique-t-on dans l’entourage de Laurent Fabius, le ministre des affaires
étrangères, qui devait présider la cérémonie de signature de l’accord vendredi matin. Le fonds « aura
vocation à investir dans des projets portés par des entreprises françaises, dans le cadre de leur
développement en Arabie saoudite (…) et dans les pays membres du Conseil de coopération du Golfe
[Oman, Koweït, Bahreïn, Emirats arabes unis et Qatar], et à bénéficier ainsi de la croissance rapide de
cette région, dont l’Arabie saoudite, membre du G20, constitue la première économie », justifie le Quai
d’Orsay.
Embellie des relations franco-saoudiennes
Preuve supplémentaire de l’embellie des relations entre la France et le royaume saoudien, le prince
Al-Walid a également invité un consortium de huit entreprises tricolores à entrer au capital de sa
holding. Axa, Engie, Orange, Safran, Suez environnement, Aéroports de Paris, Eiffage, Edenred vont
ainsi investir un total de 150 millions de dollars (134 millions d’euros) dans KHC, soit 1 % de la
capitalisation de celle-ci. Il s’agit « d’accroître leur présence économique en Arabie saoudite et dans le
Golfe », explique-t-on au ministère des affaires étrangères. « C’est la première fois qu’Al-Walid
accepte d’ouvrir son groupe à des entreprises étrangères, c’est une réelle marque de confiance, confie
un bon connaisseur des relations franco-saoudiennes. Cela va permettre à ces sociétés de gagner en
visibilité et de bénéficier de la carte de visite d’Al-Walid, qui est très influent dans la région mais
également en Afrique. » Cette entrée au capital de KHC s’explique aussi par l’ouverture aux étrangers
de la bourse de Riyad, première place financière de la région, avec une capitalisation de près de 600
milliards de dollars, officialisée le 15 juin.
« Une fenêtre de tir que nous devons exploiter »
Ces accords de coopération marquent un nouveau signe du rapprochement entre la France et l’Arabie
saoudite, initié par François Hollande à son arrivée à l’Elysée en 2012. Jusqu’ici inféodé aux États-Unis,
le royaume wahhabite est en désaccord avec Washington sur la question du maintien de Bachar AlAssad à la tête de la Syrie et sur la signature d’un accord sur le nucléaire iranien. « Il y a une fenêtre
de tir que nous devons exploiter », estimait un chef d’entreprise français lors d’une visite, en avril, de
M. Fabius à Riyad. Les échanges commerciaux entre les deux pays, qui ont atteint 10 milliards d’euros
l’an dernier, sont il est vrai très déséquilibrés. La France a importé, en 2013, plus de 7 milliards d’euros
de produits hydrocarbures en provenance d’Arabie saoudite, soit trois fois plus qu’il y a cinq ans. Les
exportations françaises n’ont, dans le même temps, progressé que de 14 %, pour atteindre
péniblement 2,9 milliards d’euros. Pis, le nombre d’entreprises tricolores exportant vers le royaume,
aujourd’hui estimé à 4 000, n’a cessé de diminuer ces dix dernières années.