30 mars 2006

Les « boutiques » tirent leur épingle du jeu dans les fusions-acquisitions

Les « boutiques » tirent leur épingle du jeu dans les

fusions-acquisitions

Les sociétés de conseil indépendantes des grandes banques se montrent très actives. Elles profitent elles aussi d’un marché particulièrement dynamique.

Elles sont petites, discrètes mais très présentes. Dans un univers des banques d’affaires en pleine effervescence depuis le début de l’année, boom des fusions-acquisitions aidant, les « boutiques » tirent leur épingle du jeu. En France, on a ainsi vu le nom de Philippe Villin Conseil associé à l’opération annoncée lundi sur Elior et, quelques jours plus tôt, au rapprochement des Caisses d’Épargne avec les Banques Populaires. Cette opération met aussi en lumière le rôle de Bucéphale Finance. Quant à Toulouse et Associés, son nom est associé au rapprochement de Suez et Gaz de France. Bref, les BNP Paribas, Rothschild, JP Morgan, Goldman Sachs et autres Lazard ne sont pas les seules à avoir du pain sur la planche.

Conjoncture exceptionnelle. Les « petits » indépendants profitent eux aussi d’une conjoncture exceptionnelle dans les métiers du conseil en M&A. Et jouent de leur différence. « Pour réussir, une boutique doit apporter une valeur ajoutée spécifique, par exemple la proximité avec un dirigeant ou une connaissance particulière d’un secteur. Mais l’avantage concurrentiel tient surtout en deux mots : indépendance et discrétion. Nous sommes indépendants car nous n’avons rien à vendre, sinon notre compétence et notre expertise, et nous sommes discrets car peu nombreux. Cela nourrit la relation de confiance avec nos clients », plaide Jean-Baptiste Toulouse. Il ne reste plus qu’à être là au bon endroit et au bon moment.

« Le dossier de rapprochement entre les Caisses d’Épargne et le groupe Banque Populaire est un cas d’école. C’est un projet auquel tout le monde pense mais, parce qu’il supporte beaucoup de contraintes, doit être accompagné dans la durée pour sortir au moment opportun. Il faut avoir à la fois la lecture des événements, la connaissance des hommes et proposer le bon schéma. De grandes banques par la taille peuvent aussi le faire, mais c’est aussi le genre de dossier où une boutique peut faire la différence », fait valoir Jean-Marc Forneri de Bucéphale Finance. Sur tous ces dossiers, les boutiques n’interviennent évidemment pas seules.

Leur capacité d’exécution ne saurait se comparer à celle des établissements de plus grande taille, intégrant plusieurs lignes de métiers et une présence internationale. Pour Philippe Villin, la méthode est finalement assez simple. « Mon métier peut s’assimiler à celui d’un chirurgien qui consulte ses patients à son cabinet, mais qui se rend dans une clinique pour procéder à l’intervention elle-même en bénéficiant de son plateau technique et de l’assistance de son personnel permanent, et le cas échéant d’un second chirurgien pour l’aider. Je suis là pour faire le diagnostic, aider à la décision, imaginer et concevoir une opération. Pour son exécution, j’y participe étroitement en la dirigeant et en m’appuyant en même temps sur une banque d’affaires traditionnelle qui m’offre ses moyens techniques et intervient en outre le plus souvent comme coconseil », explique-t-il.

Modèle porteur. On l’imagine, ces trois « boutiques » (en l’occurrence une entreprise unipersonnelle dans le cas de Philippe Villin), se livrent une sérieuse concurrence. On est après tout dans le monde des banquiers d’affaires. Mais le modèle n’apparaît pas moins pertinent. D’illustres aînés ont déjà montré la voie, comme Greenhill aux États-Unis. « Je pense que nous revenons peu à peu à une conception plus traditionnelle de la banque d’affaires. On commence à dépasser l’ère des hypermarchés de la finance », veut croire Jean-Marc Forneri. Signe qui ne trompe pas, certaines figures du métier, tel Joseph Perella, reprennent leur indépendance et partent à la chasse au client avec comme armes leur expérience et leur carnet d’adresses.

PASCAL HÉNISSE